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PIERRE LEUNIS

Gestion du risque de pollution de l'eau dans l'aviation civile et militaire suisse

 

De toutes les grandes inventions de l'homme, de la roue à l'imprimerie et du bateau à voiles à l'ordinateur, peu ont eu sur l'humanité un impact aussi fort que l'aviation. Les avions ont réduit les dimensions de notre planète, supprimé l'isolement des cultures, fortifié le commerce et amélioré les relations humaines ; ils ont également donné une nouvelle et terrible dimension à la guerre. Toutefois, l'aviation a deux talons d'Achille : la pollution sonore et la pollution atmosphérique. En dépit des progrès énormes accomplis pour réduire ces nuisances majeures, les perspectives d'expansion soutenue du transport aérien mondial posent désormais, sur le terrain de l'environnement, un défi de taille à l'ensemble de la recherche aéronautique.
C’est ainsi que Pierre Leunis, pilote privé, responsable administratif et financier, nous introduit dans son étude qui entreprend de résumer une partie du défi environnemental lancé par l’aviation helvétique. Nous n’avons pas l’intention de mettre sur cette page l’ensemble de l’é tude qui comporte nombre de spécifications et précisions, mais brièvement les grandes lignes puisées dans le texte, ainsi que les entretiens qui font suite.

Le premier chapitre porte sur l’identification méthodique des facteurs qui aujourd’hui contribuent à polluer l’environnement dans les milieux aéronautiques.
L’aéroport est une zone d’activités sur laquelle sont souvent installées plusieurs entreprises et où travaillent de nombreux employés. Ces activités ainsi que le transit de passagers nécessitent l’usage de grandes quantités d’eau. De plus, la circulation des avions au sol est à l'origine de plusieurs types de dépôts polluants.
La plupart des surfaces aménagées – et imperméables – que forment les aéroports accumulent des dépôts secs qui seront mobilisés par temps de pluie et entraînés avec l'écoulement des eaux. Toutefois l'eau de pluie qui entraîne ces dépôts secs n'est pas une eau propre lorsqu’elle arrive au sol. Les études effectuées sur les eaux pluviales montrent que 15 à 25% de la pollution contenue dans les eaux de ruissellement est directement imputable à la pollution des eaux météoriques résultant de l'activité urbaine et industrielle.
À cela s'ajoutent les pollutions de différentes natures liées aux activités de l'aéroport. La combustion d’un kilo de kérosène et de 3,4 kg d’oxygène produit quelques 3,15 kg de dioxyde de carbone (CO2) et 1,24 kg de vapeur d’eau. Le kérosène est un carburant relativement propre comparé aux autres produits pétroliers. Ne contenant pas de plomb, ni d’halogène, il n’y a pas de métaux lourds ou de dioxines présents dans ses émissions. Une loi Internationale spécifie que le kérosène ne peut contenir plus de 0.3% de soufre. Le kérosène généralement utilisé ne contient pas plus de 0.05% de soufre. Avec ce niveau, un kilo de kérosène produit environ 1 g de dioxyde de soufre (SO2) lors de la combustion. Le kérosène n’est pas le seul carburant d’aviation utilisé de nos jours. Seuls les avions à turbines l’utilisent. Tous les appareils munis d’un moteur à pistons, en règle générale les petits avions légers de tourisme, fonctionnent avec du carburant hautement raffiné appelé AVGAS ou 100LL. Aujourd’hui, certains petits avions utilisent du carburant diesel en raison de son prix plus attractif et de la plus faible consommation qu’engendrent les moteurs de ce type.

Lausanne-Blécherette, station service pour avions

Divers produits et matériaux destinés à la construction et à la maintenance sont également susceptibles d’être la source de pollutions. D’importantes quantités de solvants très divers sont employées, dont des variantes nuisibles pour l’environnement, comme le méthyléthylcétone et le fréon, celles-ci sont remplacées par d’autres moins nocives. Les alliages d’acier contenant du chrome ou du nickel sont employés dans l’outillage tandis que, pour les outils de coupe, on fait appel à des métaux durs contenant des carbures de cobalt et de tungstène. Le plomb, qui entrait auparavant dans le processus d’usinage et de façonnage, est désormais très peu usité, ayant été remplacé par le kirksite. Au total, on estime que l’industrie aérospatiale utilise plus de cinq mille produits chimiques et mélanges de composés chimiques, la plupart fabriqués par plusieurs fournisseurs, et beaucoup de composés qui contiennent souvent une dizaine d’ingrédients. La composition exacte de certains produits est protégée par des brevets ou tenue secrète pour des raisons commerciales, ce qui ajoute encore à la complexité de cet ensemble hétérogène.
Les services au sein des aéroports sont aussi susceptibles d’engendrer diverses émissions polluantes. Dès que la température au sol approche de 0°C, les avions sont dégivrés afin qu’ils puissent décoller et être exploités en toute sécurité. Les produits utilisés dans les opérations de dégivrage sont constitués d'un mélange d'eau et de glycol qui est appliqué chaud. Si ces produits devaient se retrouver dans les cours d'eau en concentration appréciable, ils pourraient être toxiques pour la faune et la flore aquatique. En hiver, il est parfois nécessaire de procéder à un déverglaçage des aires de stationnement, des aires de circulation et des pistes. L’utilisation de produits antigel spécifiques en grande quantité peut induire un risque de pollution pour l’environnement.

Cointrin : gros trafic d'un samedi pluvieux

À chaque atterrissage, les avions laissent un peu de la gomme de leurs pneus sur la zone de contact. Les résidus de gomme sont en général évacués avec les déchets à incinérer. Aux abords des pistes, les concentrations en cuivre sont souvent élevées, et d'autant plus importantes que l’on s’approche de la piste. Le cuivre provient essentiellement de l'usure des garnitures de frein des avions. Les concentrations des autres métaux lourds dépassent rarement les seuils autorisés et, dans tous les cas, les teneurs constatées près de la piste ne nécessitent pas de mesures d’assainissement. À l’instar des bords des axes routiers ou ferroviaires, la pollution par les métaux lourds est liée à la quantité de trafic.
Les eaux usées d’un site aéroportuaire de grande taille proviennent de ses installations sanitaires, de la vidange des toilettes des avions, du lavage et de la réparation des avions ou des véhicules utilitaires, des cuisines des restaurants, ainsi que des différents ateliers techniques. Les eaux des égouts d’un aéroport international correspondent à ce que peut produire une agglomération de trois à cinq mille habitants. Ces eaux souillées sont, si nécessaire, prétraitées sur place, puis amenées à travers le réseau de canalisations jusqu’à une station d’épuration. L’Aéroport International de Genève par exemple, ne dispose pas de sa propre structure de purification des eaux dans la mesure où la capacité de l’installation cantonale permet de traiter, dans les meilleures conditions, tous les effluents de la zone aéroportuaire.
Par atteintes à l’environnement, on entend les pollutions atmosphériques, le bruit, les vibrations, les rayons, les pollutions des eaux et les autres interventions dont elles peuvent faire l’objet, les atteintes portées au sol, les modifications du patrimoine génétique d’organismes ou de la diversité biologique, qui sont dus à la construction ou à l’exploitation d’installations, à l’utilisation de substances, d’organismes ou de déchets ou à l’exploitation des sols. Un système d’évacuation des eaux des voies de communication sur les aérodromes doit garantir la sécurité et le confort pour les usagers, tout en remplissant simultanément les différentes exigences relatives à l’environnement. Il s’agit en particulier de boucler le cycle de l’eau de la manière la plus naturelle possible sans que les eaux soient polluées. De plus, il faut garantir que la fertilité du sol se conserve à long terme en dehors des installations. Selon la loi sur la protection des eaux (LEaux) du 24 janvier 1991 et l’ordonnance correspondante sur la protection des eaux (OEaux) du 28 octobre 1998, les eaux polluées doivent être traitées et les non polluées infiltrées. Les eaux sont considérées comme polluées si elles peuvent elles-mêmes polluer des eaux.

L’auteur réunit ensuite les aspects juridiques de la protection des eaux dont certains ont déjà été traités dans d’autres études, citons juste le Plan sectoriel d’infrastructure aéronautique (PSIA) : Le PSIA fixe de manière contraignante pour les autorités les exigences et objectifs relatifs à l’infrastructure de l’aviation civile suisse. En octobre 2000, le Conseil fédéral a approuvé les objectifs et exigences de caractère conceptionnel du PSIA. Depuis, les fiches de toute installation aéroportuaire doivent être approuvées par étapes. Chaque fiche par installation du PSIA définit les conditions générales de l'exploitation, le périmètre d'aérodrome, l'exposition au bruit, l'aire de limitation d'obstacles, la protection de la nature et du paysage ainsi que l'équipement.
Dans le second chapitre, Pierre Leunis traite de la gestion du risque de pollution dans les aéroports.
Concernant les aéroports, la pollution entraînée dans les eaux est très inférieure à celle rencontrée sur les routes et autoroutes, à l'exception du paramètre métaux lourds, lié à l'importance de l'usure des pneus et des freins au moment des atterrissages. Des pollutions ponctuelles interviennent cependant à l'occasion des opérations de déverglaçage et de dégivrage des avions (un dégivrage requiert l'utilisation d'environ 750 litres de glycol), et surtout, des exercices d'entraînement des pompiers (feux de kérosène générant d'importants rejets d'hydrocarbures dans les eaux). Ces pointes de pollution sont généralement évitées par une meilleure sensibilisation des personnels aux risques de pollution, et par l'aménagement systématique de zones d'exercice (terrains entourés de bassins de retenue ou de fossés d'écoulement dont le rôle dans l'épuration est très important). Des pollutions accidentelles aux hydrocarbures, tel que le trop plein d’un réservoir d’avion se déversant sur le sol par exemple, sont également possibles. Ainsi, toutes les précautions sont prises pour prévenir une pollution chronique et accidentelle. Des mesures paraissent particulièrement nécessaires lorsque les aéroports sont situés à proximité de prises d'eau utilisées par les installations de production d'eau potable. Ces précautions se traduisent par l’aménagement d’infrastructures (bassins de traitement de la pollution chronique et accidentelle sur les aires de maintenance, séparateurs d’hydrocarbures sur les aires de stationnement, etc.) destinées à traiter les eaux pluviales avant leur rejet dans le milieu naturel.

La Petite Glâne le long de l'Aérodrome de Payerne

Nous découvrirons ci-après les systèmes de drainage et de filtration les plus couramment utilisés dans les aéroports, que les lecteurs de la brochure peuvent découvrir en détail, sont :

  • Fossés enherbés : La principale fonction des fossés est d’évacuer l’eau. L’objectif est de rééquilibrer la qualité de l’eau de ruissellement présentant une Demande Chimique en Oxygène (DCO) élevée.
  • Bassins et ouvrages de régulation : Le choix de la régulation est important car il conditionne pour une grande part l’efficacité des dispositifs de traitement avant rejet dans le milieu, dans les cas où l’on prévoit un bassin ou un réservoir.
  • Déshuilage et séparateurs à hydrocarbure : Le déshuilage a pour but de séparer les particules à faible densité de l’eau.
  • Filtration et infiltration : L’objectif de la filtration est de retenir les matières en suspension les plus fines.
  • Dispositifs de piégeage passifs et actifs d’une pollution : Le piégeage passif doit permettre d’isoler une pollution sans aucune intervention humaine. Le principe de piégeage actif doit répondre à la mise en sécurité d'une ressource en eau contre une pollution accidentelle, miscible à l'eau ou non, concomitante avec un épisode pluvieux. Le principe de piégeage actif nécessite l'intervention humaine, que ce soit pour la surveillance de la section concernée ou pour l'intervention sur les dispositifs.

L’Office fédéral de l’aviation civile et l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage (OFEV) ont élaboré conjointement des recommandations concernant la compensation écologique sur les aérodromes. Elles contiennent des informations sur les possibilités d’aménager des surfaces proches de l’état naturel.
La compensation écologique sur les aérodromes permet non seulement à la flore et à la faune d’acquérir un meilleur habitat, elle offre également l’occasion de réunir diversité biologique, activité aéronautique et technologie de pointe. Cette association entre technique et nature est un défi particulièrement fascinant et motivant pour notre société moderne.
Les terrains ouverts des aérodromes, utilisés ou non par l’agriculture, se prêtent principalement aux surfaces de compensation suivantes : prairies permanentes extensives ou peu intensives, jachères florales, haies, bandes culturales extensives et bordures de chemins. Ces surfaces remplissent les exigences de sécurité spécifiques à l’aviation, sont facilement réalisables et génèrent une plus-value écologique substantielle. Ainsi les jachères florales, dont les multiples couleurs les rendent particulièrement esthétiques, offrent une protection optimale à certains oiseaux et petits rongeurs qui nichent au sol. Leur végétation constitue en outre, en l’absence de tout traitement par des herbicides ou insecticides, un garde-manger idéal pour ces animaux. Elles sont enfin le refuge de nombreuses espèces végétales, souvent rares et même menacées.
Une valorisation écologique est également réalisable dans les zones bâties, c’est-à-dire sur des surfaces étanchéifiées. La végétalisation des toits plats ou des façades, l’utilisation de revêtements permettant à des plantes de se développer sur les routes et parkings, la récupération des eaux de pluie pour la création d’étangs, la végétalisation des bassins de rétention ou l’aménagement de plates-bandes de fleurs sauvages ne sont que quelques exemples de ce qu’il est possible de faire pour donner plus de place à la nature sur les sites aéroportuaires.

À intervalles réguliers, les médias évoquent les quantités massives de carburant dont les avions se délesteraient en vol. Si cela se produit bel et bien, c’est essentiellement lorsqu’il le faut, pour éviter une situation dangereuse pour l’appareil, les passagers et l’équipage. Les directives édictées par l’OFAC et régissant le largage de carburant font que d’une part l’opération ne comporte aucun danger pour l’appareil, et d’autre part que le carburant évacué ne pollue pas le sol et les eaux, car il s’évapore rapidement. Le choix de la zone de largage s’inspire principalement de deux critères : les conditions météorologiques et les autres appareils pouvant traverser le secteur. Le largage de carburant n’étant pas une procédure normale, on ne saurait le planifier. Malgré la croissance du trafic aérien, les cas d’évacuation d’urgence du carburant n’ont pas sensiblement augmenté ces dernières années. Entre 1990 et 2003, il s’en est produit en moyenne cinq par an dans l’espace aérien suisse, avec 26 tonnes de carburant largué en moyenne lors de chaque opération.

Camion nettoyeur des zones de mouvements et de stationnement à l'Aéroport International de Genève


Afin d’avoir un avis éclairé sur ce qui est entrepris par les aérodromes suisses pour préserver l’environnement et les eaux en particulier, nous nous sommes entretenus, le 12 janvier 2006 à Lausanne, avec Me Pierre Moreillon, Secrétaire de l’Association suisse des aérodromes, qui a répondu dans le détail à nos questions.

Comment est structurée votre Association ? Quelle est sa finalité ?

Nous sommes dotés d’une structure associative classique et assurons deux fonctions principales. D’une part nous fournissons des conseils à nos membres : l’exploitation d’un aérodrome devenant de plus en plus complexe, il faut assister et conduire les personnes responsables au travers des méandres normatifs et règlementaires. D’autre part nous représentons la communauté des aérodromes suisses auprès des autorités lorsque les intérêts généraux de nos membres sont mis en cause, mis en péril ou doivent être représentés dans le cadre de procédures de consultation, sur le plan législatif par exemple.

En tant qu’homme de loi, pouvez-vous brièvement citer et décrire les articles de loi et les ordonnances fédérales, cantonales et communales qui lient l’aviation civile au respect de l’environnement, et plus particulièrement au respect de l’eau ?

Les dispositions de la protection de l’environnement et de la protection des eaux s’appliquent évidemment directement aux installations aéroportuaires et aux champs d’aviation. Ce qui est important pour nous, c’est l’articulation qui est créée notamment par l’ordonnance sur l’infrastructure aéronautique (OSIA). L’OSIA régit la prise en compte des intérêts environnementaux et de la protection de l’eau dans le cadre des processus aéronautiques. Lors de la construction d’une installation, lors d’une procédure d’approbation de plans, lors de l’octroi d’une concession d’exploitation ou d’une autorisation d’exploitation pour les aérodromes non-concessionnés, l’autorité et l’exploitant doivent tenir compte des normes régissant le respect de l’environnement. Tout cela se fait dans le cadre de procédures qui sont unifiées au niveau de l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC).
Il faut encore préciser qu’en plus du cadre fixé par l’OSIA, l’exploitation d’un aérodrome doit respecter celui qui est fixé par le PSIA (Plan sectoriel d’infrastructure aéronautique). L’OSIA est une règle légale, le PSIA est un faisceau de décisions qui ne dépend pas de la législation sur l’environnement, ni de la législation aéronautique. C’est un instrument, prévu par la loi fédérale sur l’aménagement du territoire.

Qui dit aménagement du territoire, dit évidemment appréciation des activités à incidence spatiale. Elles doivent être analysées et quantifiées afin de mesurer leur impact sur l’aménagement du territoire. C’est ainsi que la boucle est bouclée puisque le PSIA aboutit à l’élaboration de fiches d’objets contenant des décisions elles-mêmes contraignantes pour les autorités dans l’application de l’ordonnance sur l’infrastructure aéronautique OSIA. Ces autorités ne peuvent décider que dans le cadre de ce qui a été fixé dans le PSIA.
 

Installation de pompage de kérosène
en milieu de piste à Cointrin

Chaque aérodrome fait donc l’objet d’un traitement spécifique ?

Pour chaque aérodrome, l’impact sur les eaux, tant de surface que souterraines, est analysé. Pour chacune des cent quatre-vingts installations aéronautiques suisses, une fiche du PSIA est établie au terme d’un processus de coordination piloté par l’autorité cantonale. Une ou plusieurs séances de consultation et de coordination sont organisées, auxquelles participent les représentants des Services des forêts, des transports, du tourisme, des eaux, etc. Chacun analyse la problématique qu’il représente, donne son avis, préconise le cas échéant des mesures à prendre. Tout cela est intégré dans un protocole de coordination et ensuite transformé en fiches d’objet approuvées par le Conseil fédéral. Ces fiches traitent aussi de la problématique de l’eau.   

Comment la loi oblige-t-elle les aérodromes à mettre tout en œuvre pour protéger les eaux tant de surface que souterraines ?

La loi oblige les exploitants d’aérodromes à respecter les règles de protection de l’environnement, ne serait-ce que par l’intermédiaire de l’OSIA. L’OFAC surveille ou fait surveiller par des tiers (autorités cantonales, bureau d’ingénieurs, etc.) l’application des exigences spécifiques à l’aviation, des exigences opérationnelles, des exigences de la police de l’urbanisme et des exigences de la protection de l’environnement. L’OFAC a pour tâche de surveiller l’application des règles légales, des décisions et de la jurisprudence sur les aérodromes et en cela aussi les règles de protection de l’environnement.

La compensation écologique est-elle une mesure volontaire sous l’autorité du Chef de place ? Quelles sont les mesures incitatives favorisant cette compensation écologique ?

Elle n’est pas une mesure volontaire et n’est pas sous l’autorité du Chef de place. Il s’agit d’une obligation qui est faite à l’exploitant de l’aérodrome. La compensation écologique est fixée par un certain nombre de règles qui sont des pratiques administratives. Elles ont fait l’objet d’une brochure destinée aux exploitants d’aérodromes. À l’heure actuelle, vous ne passez plus de dossiers de construction ou de modification sur un aérodrome sans proposer une mesure de compensation écologique. L’État ne prend pas de mesures incitatives, il impose la compensation écologique.

Prenons l’exemple de l’Aéroport de Lausanne, où la mise à disposition de surfaces de compensation écologique fait l’objet d’une décision dans la fiche d’objet du PSIA. Tout un chapitre d’explications accompagnant la fiche d’objet est consacré à la compensation écologique. Les critères pouvant être assez contraignants sont définis par l’Office fédéral de l’environnement dans une brochure publiée à cet effet.

Concernant les compensations écologiques, quelle est la place laissée à la valorisation des milieux aquatiques ?

L’importance de la compensation écologique liée à l’eau est dépendante du positionnement géographique de l’aérodrome. Chaque cas est concret et individualisé, il n’y a pas de règle générale si ce n’est quelques principes, notamment celui des 12% du périmètre d’aérodrome à valoriser d’un point de vue écologique.


Il nous a paru important de rencontrer Mme Martine Voutaz Thomas, responsable environnement Eaux/Déchets de l’Aéroport International de Genève, le 19 janvier 2006 afin de connaître l'engagement de l’AIG dans la gestion du risque de la pollution des eaux.

Pouvez-vous vous présenter, quel est votre parcours professionnel et en quoi consiste votre travail au sein de la Division Eaux/Déchets de l’Aéroport International de Genève (AIG) ?

De formation ingénieur en génie rural avec une spécialisation en environnement, j’ai d’abord travaillé dans un bureau d’ingénieurs conseils sur des études d’impacts dans les domaines du sol, du bruit et de la qualité de l’air. Après cette expérience, j’ai été engagée par l’AIG en tant que responsable environnemental Eaux/Déchets. Mon travail consiste principalement à mettre en place des mesures de protection de l’environnement qui s’imposent par le biais légal, ou des mesures proactives.

Où en êtes-vous dans la démarche ?

Actuellement nous avons terminé l’inventaire de toutes les canalisations que nous avons compilées sous forme de cadastre. Ce cadastre, mis sur un support informatique (système d’information géographique : SIG), représente l’ossature du PGEE. Certains rapports dénommés rapports d’états, qui font également partie de la première phase d’inventaire, sont en cours d’élaboration. Nous sommes donc dans la phase de diagnostic. La fin de la phase 2 du PGEE est prévue pour fin 2006. En fonction des solutions retenues, la mise en œuvre pourra prendre plusieurs années.

   Prélèvement automatique d'eau
   dans le Vengeron

Existe-t-il des procédures standardisées permettant aux aéroports de faire face dans les plus brefs délais à une pollution majeure ? Si oui, quelles sont-elles ? Quelles sont les instances qui les édictent ?

Notre service interne de sécurité suit les directives Internationales de l’OACI (Organisation de l’aviation civile Internationale). Nous avons développé des procédures internes calquées sur ces directives et acquis du matériel en conséquence. En cas de pollution importante ou de catastrophe, le service de sécurité de l’aéroport intervient de concert avec les autorités cantonales. Il existe des plans d’intervention qui impliquent la collaboration avec les services de sécurité extérieurs. Nos services de sécurité s’entraînent régulièrement sur des sites européens spécialement dédiés à la gestion de catastrophes où ils peuvent s’exercer dans des situations réelles avec des feux de kérosène et des déversements d’hydrocarbures.

Quels sont les incidents et/ou accidents majeurs de ces dix dernières années liés à une atteinte de l’environnement recensés sur le site de l’aéroport ? Le cas échéant quelles en furent les conséquences ?

Le seul accident important que l’aéroport ait connu est celui d’un avion qui, dans les années quatre-vingts, est sorti de piste en déversant de grandes quantités de carburant au sol. La zone de l’accident a été assainie. Il n’y a pas eu de contamination des eaux de la nappe phréatique mais environ un tiers de la quantité de kérosène déversée lors de l’accident s’est écoulé dans le lac Léman malgré les efforts entrepris lors de l’intervention.

Concernant la compensation écologique, quelle est la place laissée à la valorisation des milieux aquatiques à l’Aéroport International de Genève ?

Les zones humides naturelles sont incompatibles avec l’activité aérienne de l’Aéroport International de Genève. Qui dit milieu aquatique dit attirance des oiseaux et donc danger de collision aviaire. Les milieux humides à proximité de l’aéroport sont dès lors indésirables. Nous en avions par le passé, mais ils ont été drainés afin de limiter l’accès au site par les oiseaux.

Pour conclure, vous semblez confiante dans la gestion de l’environnement par l’AIG.

Les questions environnementales sont gérées sur notre site depuis longtemps. La qualité de l’environnement de l’aéroport, et des eaux que nous rejetons, font l’objet d’une attention soutenue de notre part.


Le 25 janvier 2006, dans le cadre d’un entretien sur la politique environnementale mise sur pied par l’Aérodrome de Payerne, les responsables de l’Environnement et du Service du feu de l’Aérodrome de Payerne, MM Dubi, Masset et Huguet (respectivement de gauche à droite sur la photo) se sont volontiers prêtés au jeu des questions/réponses, qui nous permettent de découvrir de quelle manière le risque de pollution est abordé et géré par le Département fédéral de la défense, respectivement par la base aérienne de Payerne.

De gauche à droite, MM Dubi, Masset et Huguet devant un Pilatus PC7 à Payerne

Quel est le statut juridique de l’Aérodrome de Payerne et comment est-il structuré du point de vue environnemental ?

Réponse collective (RC) : L’Aérodrome de Payerne a un statut militaire. Il ne bénéficie pas d’un statut particulier vis-à-vis de l’environnement. Le DDPS est tenu de respecter la loi et les ordonnances liées de l'environnement comme tout citoyen et organisation en Suisse.

L’aérodrome réalise-t-il des mesures régulières du taux de polluants tant au sol que dans les eaux alentours ?

RC :    Pour le moment aucune mesure des taux de polluants n’est réalisée sur l’Aérodrome de Payerne. Actuellement nous effectuons l'analyse des sites potentiellement contaminés selon les directives émises par le secrétariat général du DDPS.

Y a-t-il une période dans l’année durant laquelle vous pensez que le taux de pollution sur l’aérodrome est plus important en raison du climat ?

RC :    Lorsqu’il y a une couverture nuageuse basse, principalement en automne et au printemps, les matières en suspension retombent assez rapidement au sol. De ce constat, on pourrait dire effectivement que selon certaines conditions climatiques, le taux de matières polluantes au sol sur la zone de l’aérodrome augmente. Nous ne pouvons par contre pas évaluer quelle part de cette pollution est due aux activités de la base aérienne. Il convient de préciser que seule une petite quantité de ce kérosène est brûlée dans la région payernoise, lors des décollages et atterrissages.

Comment sont aujourd’hui traitées les eaux usées de l’aérodrome ?

RC :    Il existe sur la zone de l’aérodrome un réseau urbain d’eaux usées mesurant environ 45 km de longueur et qui écoule les eaux directement à la STEP de la Petite Glâne. L’Association Intercommunale de la Petite Glâne (AIPG) traite les eaux d’une dizaine de communes avoisinantes ainsi que celles de notre aérodrome.

Zone spécialement dédiée aux exercices d'extinction d'incendie à l'Aérodrome de Payerne

En cas de problème majeur (accident, fuite d’hydrocarbures, etc.), l’Aérodrome de Payerne est-il d’après vous capable aujourd’hui de faire face seul, avec ses propres moyens, à une pollution importante ?

RC :    Cela dépend de l’ampleur du phénomène. En principe nos services internes de secours interviennent en premier sur la zone de l’accident. Si une pollution d’un cours d’eau devait avoir lieu, nous ferions appel aux centres de renfort de Payerne ou d'Estavayer-le-Lac, qui installeraient des barrages afin de limiter la contamination. Mais la neutralisation locale de la pollution sera prioritairement assurée par le personnel d’intervention de la base aérienne. Dans la grande majorité des cas, nous sommes en mesure de répondre nous-mêmes à ce type d’incident. Nous traitons le site et l’assainissons.

Concernant la compensation écologique, quelle est la place laissée à la valorisation des milieux aquatiques sur l’Aérodrome de Payerne ?

RC :    Nous n’avons pas de zone aquatique digne de protection particulière sur le site de l’Aérodrome de Payerne. Tous les marais sur lesquels l’aérodrome a été construit ont bien entendu été asséchés. Toutefois, dans le cadre du projet NPA (Nature-Paysage-Armée), une des mesures prévoit de remettre à ciel ouvert une zone humide d’une certaine taille permettant la création d’un étang d’environ 30 ares (3000 m2). Cette mesure permettrait de drainer les terrains alentours qui sont situés en zone inondable. Cet endroit est situé à une centaine de mètres de la piste.

La conscience écologique est-elle un thème prioritaire pour l’Aérodrome de Payerne ?

RC :    Bien entendu, le Département de la défense a permis la sauvegarde de sites de valeur environnementale et paysagère d’une manière durable, en protégeant ces zones des investisseurs immobiliers, de la déprédation ou de l’occupation. Ces sites sont restés à l’état naturel et sont souvent des zones refuges pour la flore et la faune.

Pour conclure, quelle est votre appréciation sur l’importance de l’eau dans votre environnement militaire ?

RC :    La qualité de l’eau est un thème primordial pour le Département de la défense, qui cherche à réduire au minimum l’impact de ses activités sur les espaces naturels qu’il occupe. L’eau est un bien utilisé avec modération par l’armée. Celle-ci édicte des prescriptions et des recommandations sur le comportement à adopter dans les installations et dans la nature. À cet effet, une nouvelle station de lavage d’avion, avec récupération et traitement de l'eau en vue de sa réutilisation, est actuellement à l'enquête publique.

L'aérodrome régional d'Yverdon-les-Bains après la pluie


CONTENU :
64 pages A4, photos couleurs

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Février 2006
 


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